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Une nécropole mérovingienne ?

                       De nombreux écrits anciens et des observations contemporaines semblent plaider pour la présence autour de l'église de Couville d'un ensemble archéologique de type nécropole mérovingienne de grand intérêt mais qui, pour diverses raisons, n'a pu être exploité.

 

                      Ce qui retient l'attention c'est l’inhabituelle étendue de la surface d'inhumation qui caractérisait la paroisse de Couville. Dans son manuscrit l'abbé Tardif (qui exerça son ministère en tant que curé de la paroisse de 1874 à 1899) soulignait le caractère vaste du cimetière à son époque mais qui l'était encore plus par le passé. En labourant assez profondément les champs alentours ou en creusant des fosses pour y effectuer des plantations furent mis au jour « un nombre considérable de sarcophages en tuf quelquefois déposés à moins de 0m 25 cm de profondeur ». Le prêtre précisait que « ces sarcophages contenaient des ossements parfaitement conservés lorsque l'air extérieur n'y avait pas pénétré ».

                     En 1852, Nicetas Périaux (1801-1877 / libraire-éditeur, archéologue éclairé et maire de Querqueville de 1834 à 1864) en visite dans la commune à l'occasion de la découverte des haches à douille en février écrivait : « Il y a une vingtaine d'années, en arrachant des vieux chênes qui ombrageaient le cimetière, on mit à découvert une grande quantité de cercueils en pierre, en majeure partie mutilés par les racines de ces arbres séculaires ». Des découvertes avaient donc eu lieu dans les années 1830 . L'une en particulier attira l'attention : à l'occasion de l'élargissement de la route de Bricquebosq vers 1826 fut trouvée à l'intérieur d'un sarcophage en tuffeau contenant également des ossements enfoui sous la haie de l'église une plaque  gravée de schiste noir (ardoise dite de Siouville). Elle porte l'inscription suivante : « Bertowinus I C R  » , qui fut considérée comme le mémorial d'un saint de l'époque mérovingienne.

 

L'interprétation la plus commune est :

Bertowinus (h) ic r(equiescit)

(Ici repose Bertowinus)

 

L'on trouve quelquefois: « Bertowinus ICP »

( Bertowinus Jesus Christi Presbyter ou Praedicator)


                             

                  En cette même année 1852, à l'occasion de l'inhumation de l'abbé Pierrre Le Cordier Desjardins, Périaux signale que « quatre nouveaux cercueils ont été trouvés à l'endroit où l'on a inhumé le curé de Couville. Ils étaient placés l'un sur l'autre ».

                               Au mois de janvier 1877, en arrachant des vieilles souches dans la partie sud du cimetière, où l'on n'inhumait pas habituellement, on découvrit plusieurs « cercueils » que l'auteur dataient du VIIIe siècle.

(« Zigzags aux Environs de Cherbourg», par M. JOUAN, Mémoires de la Société nationale académique de Cherbourg, 1879, p.385).

                              Début 1899, l'abbé Tardif évoque la découverte de deux sarcophages en « tuf ou calcaire de Sainteny » lors du creusement d'une fosse afin d'y planter un pommier. Il décrit deux sépultures juxtaposées, deux sarcophages « couvertures en forme de toit et évidés, à l'intérieur dimensions différentes aux pieds et à la tête ». Les différents auteurs omettent de préciser le devenir de ces découvertes... L'on sait que le sarcophage attribué à Bertowinus trônait encore dans le cimetière en 1852.

                            Plus près de nous, en 2011, est signalée à Couville « la création d’une aire de stationnement en bordure du cimetière [qui] avait occasionné des dégâts irréversibles du point de vue archéologique ». La coupe présentait des « fragments osseux, de fragments de calcaire coquillé vraisemblablement d’origine des carrières de Sainteny utilisé généralement, dans la région, pour la réalisation de sarcophages à la période mérovingienne et de tessons de céramique peut-être de la période gallo-romaine ».

(Voir https://journals.openedition.org/adlfi/121268 et https://portbailpatrimoine.wordpress.com/author/portbailpatrimoine/page/2/ )

 

                     

L'église et son cimetière fin XIXe siècle à l'époque de l'abbé Tardif.
Extrait de "La Normandie monumentale et pittoresque, édifices publics, églises, châteaux, manoirs, etc.. Manche,Partie 2", A. Montier, 1899,p.11

Source :https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6480990w/f17.item.zoom

Synthèse

                                            Il apparaît que le cimetière de Couville était surdimensionné par rapport au volume d'inhumations constaté dans la seconde moitié du 18e siècle soit une dizaine par an. Cela donnait à celui-ci plus l'allure d'une prairie qu'un cimetière paroissial, d'où la tentation de faire pâturer les animaux comme dénoncé lors des différentes visites archidiaconnales.

                                   Une hypothèse consisterait à déduire que la taille du cimetière serait le souvenir d'une période, en l’occurrence l'époque mérovingienne, où les inhumations  auraient été plus massives et peut être moins « locales » en raison de la présence de             « saints » ou de personnages vénérés comme tels dont les défunts souhaitaient l'intercession pour l'au-delà.

                                         L'écho de ce souvenir se traduit lors de la visite archidiaconnale de 1721 lors de laquelle le rédacteur précise qu'          « ...il y a plusieurs siècles que le cymetière est étably et qu’il y a en apparence le corps de plusieurs saints » .

                                        Par la suite des pans entiers du cimetière ne sont plus utilisés, la végétation et surtout les arbres reprennent leurs droits et c'est lors de déracinements volontaires ou tempétueux, de plantations, d' inhumations et surtout de travaux aux 19e et 20e siècles qu'apparaissent les vestiges les plus anciens du champ des morts.

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