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La grande guerre (1914-1918)

Texte de Marc JOINEAU / Recherches complémentaires et corrections par François-Xavier BERTHIER

          En 1914 la configuration de la commune de Couville était bien différente de ce qu’elle est de nos jours. Le village de l’Eglise avec ses quelques commerces ne concentrait pas l’activité principale. Celle-ci se répartissait entre le Bourg neuf et surtout le Village de la gare.

          La gare de Couville était très active car elle desservait la Hague et le Canton des Pieux.

          Traditionnellement le bétail, spécialement les chevaux de ces deux cantons y étaient embarqués,  l’hôtel de la gare et les commerces avoisinants accueillaient les voyageurs.

Les engrais et le matériel agricole y étaient débarqués. Le nombre d’exploitations agricoles était environ de 35.

          Le samedi 1er août 1914 à 16h30 de nombreux Couvillais devaient être dans les champs car nous étions en pleine saison de fenaison et moisson lorsque le tocsin se fit entendre, annonçant la mobilisation générale le lendemain dimanche 2 août. Depuis quelques jours des nouvelles inquiétantes venaient de Cherbourg où une grande animation régnait dans les divers régiments de la ville : le 25 éme régiment d’infanterie, le 1er régiment d’infanterie coloniale. Mais chacun vacant à ses occupations pensait que cette fièvre allait retomber comme cela avait été le cas lors des crises précédentes. Imaginons la stupeur lorsque la cloche résonna en plein après midi, chacun dû laisser son activité pour se rendre à la mairie.

Armée de Terre et Armée de Mer. Ordre de mobilisation générale... Dimanche 2 août 1914

Source : Gallica / https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9017865v.item# 

La gare de Couville au début du XXème siècle

           Dés l’avis de mobilisation affiché, les Couvillais savent que la plupart d’entre eux devront rejoindre l’un des régiments cherbourgeois dès le 2 août. Tous les mobilisés des environs durent se regrouper à la gare, les familles les accompagnants jusqu’au dernier instant.

          Quelques personnes pensaient qu’il était temps de laver l’affront de 1870, que l’armée française était la meilleure et que la guerre serait courte.

          Dès le 22 août les régiments cherbourgeois rencontraient les allemands en Belgique et en montant à l’assaut sans casque avec un uniforme voyant face aux mitrailleuses allaient se faire décimer. Ils participeront après à la bataille de la Marne dans le secteur de Charleville.

Les Couvillais qui quittaient leur foyer ne pensaient pas qu’ils allaient payer un si lourd tribut à cette guerre qui, contre toute attente, allait durer 4 ans. 

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          La meilleure façon de s’en rendre compte est de reprendre en détail la liste du monument aux morts de la commune.

          Depuis 1921, date à laquelle a été érigé le monument aux morts de la commune, le maire lit la liste des Couvillais tués lors du conflit qui dura quatre longues années.

          On ne peut s’empêcher de penser que derrière chacun de ces noms se cache un drame pour la victime et aussi pour toute une famille.

         Lorsque le maire de l’époque Mr DEQUILBEC se rendait dans le village un papier officiel à la main, chacun se demandait quelle famille était touchée.

         D’autre fois, on était sans nouvelles du fils ou du frère, peut-être n’avait-il pas pu écrire. Madame CHARDOT, sœur d’Auguste ou Léon LECONNETABLE, nous a raconté que sa famille avait compris que le pire était arrivé lorsqu’ils ont su qu’un camarade de régiment et ami de son frère était venu en permission à Brix sans passer leur donner des nouvelles comme c’était l’habitude.

         Pour d’autre familles, l’attente a duré des années puisque le décès n’a été reconnu qu’en 1919, 1920 ou 1921 : on espérait que le fils soit prisonnier des Allemands mais il n’était pas sur les listes fournies par la Croix Rouge.

On remarque que dès 1914, il y eut plusieurs tués parmi les Couvillais, certains lors des premières offensives inconsidérées de l’armée française contre les divisions allemandes plus nombreuses, mieux armées et supérieures au point de vue stratégie.

 

                              Voici donc la liste des soldats morts pour la France non pas telle qu’elle figure au monument mais dans l’ordre chronologique des décès avec les quelques précisions que nous avons pu retrouver.

1914

  • Maurice LETELLIER (né en 1892 à Bauvon-Orne / Matricule au recrutement : 740 - Argentan -Orne/Garçon de café). Soldat au 104e  régiment d'infanterie: mort de blessures de guerre le 22 août 1914 à Ethe (Belgique). Inhumé par les autorités allemande à Bleid (Belgique) . Ne sera déclaré mort que par jugement du 21/01/1919

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  • Jean  GODEFROY( né en 1890 à Saint-Martin le Gréard/ Matricule au recrutement : 1120 - Cherbourg -Manche/ domestique). Marsouin  au 1er régiment d'infanterie coloniale : tué à l'ennemi le 22 août 1914 à Rossignol (Belgique), déclaré mort le 4/05/1921.

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        Ces deux Couvillais ont été tués le même jour dès les premiers engagements des bataillons de Cherbourg en Belgique. Le 22 août 1914 est la journée la plus meurtrière pour les régiments cherbourgeois 25ème RI et « Marsouins ». 10% des tués de toute la guerre, originaires de la région l’ont été ce jour. Rossignol (Belgique) est le tombeau des coloniaux cherbourgeois !

La foule à  Couville lors de l'inauguration du monument aux morts le 20 septembre 1921

  • Hyacinthe LEMAGNENT (né en 1886 à Couville/Matricule au recrutement : 881 - Cherbourg -Manche/ domestique). Soldat au 225e régiment d'infanterie: disparu le  5 septembre 1914 à La Fère Champenoise (Marne), déclaré mort le 6/4/1921. Inhumé à la nécropole nationale de la Fère Champenoise (tombe n°441)

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  • Paul LEBIEZ (né en 1884 à Benoitville/Matricule au recrutement : 668 - Cherbourg -Manche/ domestique). Soldat au 225e régiment d'infanterie : disparu le 8 septembre 1914 à Lenharée (Marne), déclaré mort le 19/01/1921. Médaille militaire à titre posthume  et Croix de Guerre avec étoile de bronze.

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  • Jean (Baptiste) ROBERGE (né en 1883 à Hardinvast/Matricule au recrutement : 159 - Cherbourg -Manche/ journalier). Soldat au 25e régiment d'infanterie:  mort le 7 septembre 1914 à Charleville (Marne).

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  • Louis LEBOISSELIER (né en 1892 à Couville / Matricule au recrutement : 632 - Cherbourg -Manche/ domestique). Matelot de 3e classe au 1er régiment de  marins: disparu le 24 novembre 1914 lors des combats héroïques des fusiliers marins à Dixmude (Belgique) : déclaré mort le 13/07/1920.

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  • Louis LEBLOND (né en 1893 à Couville/ Matricule au recrutement : 203 - Cherbourg -Manche/ domestique) . Soldat au 36e régiment d'infanterie: mort le 9 novembre 1914 à Courcy (Marne).

 

         L’année 1914 s’achève sur un lourd bilan : les Couvillais ont participé aux combats de la Marne, l’ennemi a été arrêté ; comme dans le reste de la Manche, 30% des Couvillais sont morts dès les cinq premiers mois de la guerre.

         La plupart des décès de l’année 1914 n’ont été reconnus qu’après la guerre car l’armée française se repliait.

 

  1915

  • Auguste HAMELIN (né en 1892 à Omonville La Petite / Matricule au recrutement :602 - Cherbourg -Manche/ domestique) . Caporal au 136e régiment d'infanterie: mort le 31 mai 1915 à Roclincourt (Pas de Calais). "Caporal plein d'entrain tombé glorieusement pour la France le 31 mai 1915". Croix de Guerre avec étoile de bronze

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  • Auguste LECONNETABLE (né en 1894 à Couville / Matricule au recrutement :975 - Cherbourg -Manche/ cultivateur). Soldat au 5e régiment d'infanterie:  mort le 5 juillet 1915 dans le secteur de Mont Saint Eloi/Berthonval  ( Pas-de-Calais). Inhumé dans la nécropole nationale La Targette à  Neuville-Saint-Vaast ( carré 5, rang 1, tombe 800)

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  • Jules Mourier (né en 1895 à Breuville / Matricule au recrutement :466 - Cherbourg -Manche/ domestique de ferme). Soldat au 403e régiment d'infanterie:   : tué sur le champ de bataille le 19 juillet 1915 à Mametz -Fricourt -(Somme).Inhumé à la nécropole nationale de  Bray-sur-Somme (tombe 423)

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  • Auguste GODEFROY ( né en 1892 à Saint-Martin le Gréard / Matricule au recrutement :584 - Cherbourg -Manche/Garçon d'hôtel ). Caporal au 161e régiment d'infanterie : blessé le 22 mars 1915 au Bois de la Gruerie. Plaie au pied droit par éclat d'obus. Disparu le 25 septembre 1915 à Saint-Hilaire-Le-Grand (Marne). Il est inhumé au cimetière militaire provisoire de Saint-Hilaire-le-Grand puis ses cendres transférées  à la nécropole nationale de  Mourmelon le Grand (Marne-tombe 1909) .Déclaré mort le 22/01/1918 (tué à l'ennemi).

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  • Louis ECOLIVET (né en 1876 à Theurtéville-Hague/ Matricule au recrutement :1015 - Cherbourg -Manche/Cultivateur ) .Canonnier au  3e R.A.P. ( Régiment d'Artillerie à Pied) . Evacué sur l'ambulance le 20 mai 1915 .Mort à l'hopital mixte de Quimper le 9 août 1915.

Base du monument aux morts de Couville 

  1916

  • Albert LEBOISSELIER (né en 1895 à Couville / Matricule au recrutement :391 - Cherbourg -Manche/domestique ). Nommé  caporal au 5e régiment d'infanterie le 28 juin 1916 :  mort le 20 juillet 1916 à Soyecourt (Somme).

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  • Louis ROBERGE ( né en 1887 à Saint-Martin le Gréard/ Matricule au recrutement :389 - Cherbourg -Manche/domestique ). Soldat au 70e régiment d'infanterie : mort le 24 août 1916 à Thiaumont commune de Douaumont (Meuse).

 

  1917

  • Gustave TRAVERT (né en 1895 à Couville/ Matricule au recrutement :506 - Cherbourg -Manche/forgeron). Soldat au 4e régiment de Zouaves  : mort le 20 avril 1917 à la ferme Hurtebise (entre la ferme de la Creute et le moulin de Vauclerc sur le Chemin des Dames )  Vauclerc (Aisne). "Fusilier mitrailleur d'une grande bravoure et d'un très grand sang froid. A été tué à son poste de combat le 20 avril 1917  à Hurtebise au moment même où il prenait sous son feu les servants d'une mitrailleuse ennemie". Citation à l'ordre du régiment le 13 novembre 1916 : "Zouave d'un incomparable dévouement et d'un brillant courage. S'est particulièrement distingué pendant les opérations offensives des 24 et 25  octobre 1916". Médaille militaire et Croix de Guerre.

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  • Jean MORIN  (né en 1867 à Couville/ Matricule au recrutement :594 - Cherbourg -Manche/domestique  ): Brigadier - 3e R.A.P. ( Régiment d'Artillerie à Pied)- Mort à Breuville le 30 septembre 1917

1918

  • Pierre LORIEUX (né en 1893 à Couville/ Matricule au recrutement :260 - Cherbourg -Manche/domestique ). Soldat au 9e régiment de Dragons  : disparu le 29 mai 1918 à Chambry (Aisne).

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  • Édouard DEQUILBEC (né en 1896 à Couville/ Matricule au recrutement :769 - Cherbourg -Manche/ajusteur). Aspirant au 246e régiment d'artillerie de campagne :mort à 6h45 à Sezanne (Marne) le 4 septembre 1918."Jeune aspirant plein d'allant et de courage. Dans les circonstances difficiles traversées par la batterie  aux combats des 27,28,29,30 et 31 mai 1918, s'est révélé comme un gradé remarquable par sa belle attitude  au feu et son exemple à tous. Ypérité .... le 21 aout 1918 ".  Croix de Guerre.

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  • Victor DEQUILBEC (né en 1900 à Couville/ Matricule au recrutement :684 - Cherbourg -Manche/cultivateur). Engagé volontaire pour quatre ans le 5 août 1918. Soldat au 110e régiment d'artillerie lourde : mort à l’hôpital maritime de Cherbourg par maladie le 30 octobre 1918.

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  • Louis LECOURT (né en 1889 à Couville/ Matricule au recrutement :1212 - Cherbourg -Manche/cultivateur) .Soldat au 65e régiment d'infanterie : mort dans le parc du château de  Martinvast le 9 octobre 1918 "tué en service commandé".

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  • Gustave LEFEVRE DE PLINVAL (né en 1881 à Cherbourg/ Matricule au recrutement :263 - Cherbourg -Manche/étudiant), commandant :blessé par balle le 08/09/1914 à Maurupt (51), " plaie en séton à l’avant bras droit par balle"   et le 01/12/1914 au Bois de la Gruerie (51),"plaie pénétrante à la main droite et à l'auriculaire droit par balle".  Prisonnier du 23/10/1918 au 29/10/1918.  Décédé en captivité des suites de ses blessures le 29 octobre 1918 - Feldlazaret, Fourmies (59) . Croix de Guerre avec étoile d'argent et 4 palmes, légion d'honneur

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                         Plusieurs citations :                          

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Ordre de l´Armée 2e C.A. du 07/01/1915:

     « A fait preuve de belles qualités de commandement au cours d'une attaque violente dirigée contre sa compagnie le 29/11/1914. A rejeté hors de son terrain les allemands qui auraient pu s'y infiltrer, après avoir démoli la tranchée à coup de bombe. S'est distingué le lendemain en chargeant à la baïonnette en tête d'un de ses pelotons sur une tranché allemande fortement occupée et malgré un feu très violent. A été blessé au cours de cette attaque. »

 

Chevalier de la Légion d´Honneur le 17/07/1917 :

     "Officier ardent et énergique, sur le front depuis le début de la guerre, a fait preuve en toutes circonstances, de sang froid et de mépris du danger. S´est particulièrement signalé par sa courageuse attitude au cours du combat du 21/11/1914."

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Ordre de la 6e Armée n° 527 du 10/11/1917:

     "Capitaine adjudant major de grande valeur. A conduit vigoureusement et bravement une attaque qui a brisé les résistances allemandes. A permis d’atteindre et même de dépasser les objectifs assignés »

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Ordre de la division n° 359 du 11/06/1918:

     « A fait preuve des plus belles qualités militaires dans le commandement de son bataillon au cours d'une marche de flanc nocturne en pays inconnu, précédant une attaque. A maintenu avec la plus grande énergie son bataillon sur la position conquise malgré les feux de mitrailleuses ennemies et les effets d'un tir d'artillerie trop court. »

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Ordre de la IIIe Armée n° 508 du 10/09/1918:

     « Chargé de s'emparer , avec son bataillon, d'objectifs successifs très importants et très énergiquement défendus, a réussi après cinq heures d'une progression pied à pied, à les atteindre tous, réduisant de nombreux îlots, capturant plus de 100 prisonniers et prenant un important matériel de mitrailleuses » .

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Ordre de la 1ère Armée  du 25/11/1918:

     "Officier supérieur, d´une bravoure et d´un sang froid réputé. Chef d´élite dans toute l´acceptation du terme. Le 23/10/1918 a brillamment conduit son bataillon à l´attaque de la cote 117, position très fortement organisée et âprement défendue. A réalisé dans des conditions extrêmement difficiles une importante progression vers son objectif, brisant plusieurs contre-attaques et faisant de nombreux prisonniers. Électrisant ses hommes par son exemple, a essuyé avec une poignée d´entre eux un violent retour offensif des Allemands. Grièvement blessé au cours de l´action."

Vicomte Gustave LEFEVRE DE PLINVAL (1881-1918)

Source : https://gw.geneanet.org/gaetan2?n=lefebvre+de+plinval&oc=&p=gustave

Monument aux morts d' Escrignelles (Loiret) où figure le nom du "commandant vte G. DE PLINVAL ".

Source : https://monumentsmorts.univ-lille.fr/monument/84273/escrignelles-place/?elm=3947

1919

                                                 

                                       

 

 

 

 

 

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1920

  • Paul JACQUES : (né en 1895 à Equeurdreville/ Matricule au recrutement :846 - Cherbourg -Manche/ domestique). Décédé le 23  avril 1920 à Cherbourg. Soldat au 129e régiment d'infanterie bataillon de marche puis  au 5 régiment d'infanterie. Cité à l'ordre de la division le 11 mai 1916, à l’ordre du régiment le 17 juin 1916.

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    Les années 1915, 1916 nous rappellent les grands secteurs de combats : la Somme avec ses offensives aussi meurtrières qu’inutiles, Verdun.

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     En 1918, la reprise de l’offensive par l’armée française après la seconde bataille de la Marne semble aussi avoir été coûteuse en hommes. (4 Couvillais tués dans cette période).

 

         Dans un cahier des Couvillais mobilisés depuis le 2 août 1914 que tenait Monsieur LUCE, secrétaire de mairie, il est mentionné le décès de Albert BIGNON de la classe 1903. Son nom ne figure pas au monument aux morts de la commune, mais la citation à l’ordre de la division qui lui a été attribuée est très intéressante :

    « Dépôt du.. Colonial-Extrait d’une citation à l’ordre de la division. Ordre général N°41 du général commandant la XVème compagnie d’infanterie coloniale cite à l’ordre de la division BIGNON Albert, soldat de 2ème classe n° de matricule 0.6577 du 1er colonial, soldat très énergique et très brave, toujours en avant, mortellement blessé en accomplissant son devoir, le bras arraché n’a proféré aucune plainte, forçant l’admiration de ses chefs et ses camarades…»

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     Sources :

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  • Archives Nationales :Guerre 1914 - 1918. Fonds du ministère des Pensions : livre d'or des Morts pour la France - Département de la Manche (1919-1935). Cote : 19860711/282 Commune de Couville

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Louis LABBEY (né en 1891 à Theurtéville-Hague/ Matricule au recrutement :528 - Cherbourg -Manche/      domestique). Soldat au 4e régiment de Chasseurs : mort à  Couville au domicile de ses parents le 16 mars 1919 (suite de maladie contractée au front).

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